Boulevard de Smet de Naeyer

Il y avait jadis un chemin, le Jetse Wegel, qui reliait le quartier de la rue Medori (arrière de l’ancienne caserne des Carabiniers, devenue Ecole des Cadets, puis, aujourd’hui école européenne) à Jette. La rue des Robiniers, qui va du domaine royal au pont colonial, et le bd de Smet de Naeyer, qui va du pont colonial à la chaussée de Jette, en reprennent le tracé.

La fin du boulevard de Smet de Naeyer et le pont colonial avant 1914 (collection Belfius)

C’est Léopold II qui souhaitait la création de cette artère mais il faut attendre la fin de 1895 pour que la décision soit prise. Ce boulevard fait partie du boulevard de grande ceinture traversant la partie ouest de la capitale et imaginé par Victor Besme dans son Plan d’ensemble pour l’extension et l’embellissement de l’Agglomération bruxelloise datant de 1866.

Lors de sa création, il commençait à l’avenue Sobieski (à l’époque, bd Bockstael) et son tracé ne fut achevé qu’en 1909, sur Laeken, et en 1910 sur Jette où il prit ne nom d’avenue de Smet de Naeyer, avec une nouvelle numérotation…

Ce n’est qu’au lendemain de la Première Guerre Mondiale que l’ensemble fut unifié, portant le même nom de boulevard et avec une numérotation continue commençant à la chaussée de Jette.

Sur Laeken, les premières maisons apparurent entre 1905 et 1914. L’almanach du commerce mentionne le boulevard pour la première fois dans son édition de 1907, donc sur base de la situation constatée fin 1905 – début 1906. Dans cette édition, une seule maison est habitée, le n°19 (actuellement probablement le n°635) par un certain L. Chevalier, rentier de son état. Trois maisons sont construites au-delà de l’avenue Houba de Strooper (n°27 à 31) mais elles sont encore inoccupées. L’année suivante, un premier équipement essentiel apparaît au coin du boulevard et la rue Wauters (qui s’appelait encore – la rue, pas le peintre – Fransman) : la Brasserie de l’Etang. Ce café existe toujours et s’appelle Le Régent.

L’ancienne Brasserie de l’Etang, actuellement Le Régent

Quelques bâtiments remarquables

A l’angle de la rue Salu et du boulevard, au n°523, nous trouvons une villa construite en 1923 par l’architecte Alphonse Groothaert qui fut aussi l’architecte, notamment, des n°583-585, plus loin sur le boulevard, ainsi que du parvis de N-D de Laeken.

Villa n° 523 Bd de Smet de Naeyer

Le n°557 est une maison bourgeoise de style Art Déco construite par l’architecte Mergam en 1929. Cet architecte n’a rien à voir avec le politicien libéral bruxellois Désiré Joseph Mergam qui, pour les élections législatives à la fin des années ‘60, avait choisi comme slogan : Pour de meilleurs trams, votez Mergam.

557 bd de Smet de Naeyer

Le n°559 est une autre maison de style Art Déco, construite en 1932 par l’architecte J. Vermeersch. Il est également l’architecte d’une petite vingtaine de maisons et d’immeubles repris au patrimoine régional.

n°559

Le n°570, que tout le monde connaît tant il est imposant, est un hôtel particulier de style « Beaux-Arts », construit en 1930 par l’architecte Emile Lambot et remanié en 1962 par Albert Degand pour servir de siège à l’Archevêché de Malines-Bruxelles. L’archevêque, Mgr Suenens, en fit sa résidence. Il était auparavant habité par un industriel (d’après l’Almanach de 1960)

n°570

Au n°579 , nous trouvons la maison que l’architecte Fernand Brunfaut s’est construit en 1913. Ce tronçon de boulevard entre l’avenue Houba et la rue Salu fut, à ses débuts, un fief Brunfaut. Jugez plutôt : Les maisons des n° 532, 536, 538, 540, 558 et 579 ont été construites et/ou habitées par un Brunfaut.

n°579

Fernand Brunfaut a aussi participé à la construction de l’ancienne imprimerie du journal « Le Peuple », rue St-Laurent (avec son fils Maxime), de différents ensembles de logements sociaux et de cités jardins comme celle de Moortebeek ou de La Roue. Il est aussi l’architecte de la maison n°42 rue de Laubespin.

Un petit mot au sujet de F. Brunfaut, né à Neffe-Anseremme en 1889 et décédé à Bruxelles en 1972.

Il ne fut pas seulement un architecte réputé et un socialiste militant. Il fit aussi une carrière politique : conseiller communal à Laeken, puis à Bruxelles après l’annexion de Laeken, de 1911 à 1958, il fut échevin des Travaux publics de 1914 à 1921, puis conseiller provincial du Brabant de 1921 à 1925 et enfin député de 1925 à 1961.

Le n°581 est une maison unifamiliale réalisée par Edgar Demarteau en 1913. Vous ne connaissez pas Edgard Demarteau ? Moi non plus et je n’ai rien trouvé sur ce personnage.

Autre immeuble connu de tous, le n°583-585 : Cette imposante double maison réalisée en 1911-1913 par Alphonse Groothaert, est une maison d’habitation et un atelier d’artiste occupée au début (1914) par le sculpteur D. Jacobs et le statuaire Desmarez

Mais venons en à celui qui a donné son nom au boulevard.

Comte Paul De Smet de Naeyer

Paul de Smet de Naeyer (source: wikipedia)

Paul de Smet de Naeyer est né à Gand le 13 mai 1843 dans une riche famille d’industriels du coton. Il décède à Bruxelles le 9 septembre 1913. Il reprendra les activités familiales, puis se retrouvera banquier à la tête de la Société Générale de Belgique avant de se lancer en politique. En 1886, il est élu député catholique et devient ministre. En 1888, il est nommé premier ministre mais son cabinet est rapidement emporté par la question du suffrage universel. Il revient aux affaires comme premier ministre en 1896 et le restera jusqu’en 1907. Il a été un soutien indéfectible de la politique coloniale et de modernisation des infrastructures belges de Léopold II. C’est la raison pour laquelle, la partie Nord du boulevard de grande ceinture, fut baptisée, suivant le souhait de Léopold II, du nom du comte Paul de Smet de Naeyer. Il fut aussi le promoteur d’une politique de maisons ouvrières bon marché.

Il a été anobli comte par Léopold II, le 20 mai 1900.

Il décède à Bruxelles le 9 septembre 1913.

Pour la petite histoire, la marine belge a eu un voilier école du nom de « Comte de Smet de Naeyer ». Commandé en 1904 à un chantier écossais, il chavira trois fois. Les deux premières fois, en octobre 1904, dans le bassin du chantier lors du remplissage de ses réservoirs d’eau, puis quelques jours plus tard, après rupture des câbles lors des manœuvres de redressement. La troisième fois, le 19 avril 1906 dans le Golfe de Gascogne. Il sombra, entraînant son commandant et une partie de l’équipage dans le naufrage. (http://www.marinebelge.be/comte%20de%20smet.html) Le moins que l’on puisse dire, pour chavirer dans le bassin du chantier lors du remplissage des soutes, est qu’il devait y avoir un léger problème de conception…

L’ancien Beaulieu au coin du bd de Smet de Naeyer et de l’avenue Houba